Rapport de l’étude – Gabon

1 – La fin de l’ère coloniale (1940-1959)

     Les missions civilisatrices et de conquête de terres par les colonisateurs ne pouvait se faire sans l’intégration de la médecine. En effet, les terres africaines n’étaient pas très accueillantes car le climat tropical réunissait tous les ingrédients constitutifs d’un milieu favorable au développement des vecteurs et des maladies qu’ils véhiculent. Aussi, les épidémies constituèrent-elles, naturellement, le deuxième frein à l’expansion de l’industrie européenne dans les colonies d’Afrique noire. Parmi les maladies redoutées par les explorateurs, la trypanosomiase humaine africaine apparaît comme la plus effroyable et la plus nuisible à l’entreprise coloniale (MOUBELE, 2013).

     On voit ainsi créer en 1900 à l’endroit des colonies, le Service de santé des colonies et des pays de protectorat. L’hôpital de Libreville, dit hôpital de « Brazza »fut fondé en 1890 par la marine militaire française conduite par Pierre Savorgnan de Brazza, il a été construit par les français. L’hôpital de Brazza s’agrandit avec un nouveau pavillon appelé « Hôpital de Kong », on y trouve les services de médecine, de chirurgie et de maternité pour les travailleurs autochtones.

     L’Assistance médicale indigène (AMI) voit le jour en 1899, et est le premier système de santé publique crée par l’administrateur colonial française, dans les territoires africains et indochinois colonisés par la France. Système de soins accessible à toutes les couches de la population : c’est là les prémisses de la politique sociale de santé. L’installation d’un système sanitaire au Gabon, c’est aussi l’œuvre des humanitaires à l’image du docteur Albert Schweitzer qui fonda son premier hôpital à Lambaréné (Moyen-Ogooué) en 1913 et le deuxième en 1921.

     Les débuts de la Protection maternelle et infantile (PMI) correspondent aux premières initiatives de l’œuvre du Berceau gabonais à Libreville dans les années 1936 (Longo, 2007).

     Les populations pouvaient également avoir accès aux soins via les infirmeries des compagnies ou des missions religieuses. Si dans les villes (en l’occurrence les centres urbains) on peut trouver plusieurs structures sanitaires (publiques et privées) le milieu rural souffre d’une carence où les offres de soins se limitent au dispensaire du coin. Les maladies infectieuses telles que la trypanosomiase, encore appelée « maladie du sommeil fut une faucheuse car elle décima de nombreuses populations. La lutte contre trypanosomiase débuta dans la colonie du Gabon à partir de 1945. En effet La conférence de Brazzaville de 1944, marqua la restructuration des services de santé dans les territoires coloniaux santé, en 1945, ainsi pour il eut deux structures de santé pour le Gabon vit son service de: l’Assistance médicale africaine (AMA) et le Service général d’hygiène mobile et de prophylaxie (SGHMP). En bref : Système de santé héritée de la période coloniale, médecins militaires français. Principales activités vaccinations de masse, promotion de l’hygiène. Lutte contre les grandes épidémies (Paludisme, trypanosomiases, tuberculose, lèpre). Un hôpital, appelé hôpital général de Libreville général de Libreville, fut inauguré le 1er janvier 1958, après trois années de construction (1955-1958). Ainsi en 1958, il existait au Gabon un Hôpital territorial qui se trouvait à Libreville, deux hôpitaux secondaires, dont un à Port-Gentil, dix-sept centres médicaux, trois secteurs mobiles du S.G.H.M.P., un service urbain d’hygiène, une léproserie moderne, seize infirmeries, trente-neuf dispensaires et treize formations privées dont l’hôpital Schweitzer.

     En 1958, création du centre de formation des infirmiers et des sages femmes de Libreville (Ayeni, 2007). L’insertion des femmes dans la politique sanitaire aborde ainsi une phase formelle qui marque durablement le glissement progressif vers les pratiques en matière d’accouchement. Et le centre de formation se trouvait au sein de l’hôpital Kong (devenu en 2000, Centre Hospitalier de Libreville(CHL)) (Longo, 2013). C’est ainsi que la mère et l’enfant ne sont pas en reste, car durant l’époque coloniale Gabon compte neuf centres de protection maternelle infantile (P.M.I), et En 1958, 9 maternités régionales qui avaient une capacité hospitalière de 150 lits (Longo, 2020).

2 – Le début de l’ère post indépendance (1960-1965)

     Les pouvoirs publics gabonais avaient opté pour la gratuité des soins dès l’accession du pays à l’indépendance. Au lendemain des indépendances, le Gabon prends plusieurs mesures sanitaires en faveur des populations. Renforcement des formations sanitaires existantes, construction de nouvelles structures, la formation du personnel de santé. En 1964, le Gabon comptait 30 hôpitaux et centres médicaux et le nombre de lits était de 2 834, on comptait 5 infirmeries, 61 dispensaires (service nationale de la statistique et des études économiques, 1968). Durant l’année 1965, le nombre d’hôpitaux et centres médicaux est toujours de 30 par contre le nombre de lits avaient augmenté, on comptait désormais 3037. En dehors des structures sanitaires, le colonisateur introduit les programmes d’assurances sociales dans le domaine des accidents du travail, puis l’assurance maternité et les allocations familiales. Aussi, les Régimes de protection sociale relevant du principe de la garantie sociale et des aides sociales assurent la couverture de risques sociaux spécifiques liés notamment : à la famille ; à la maternité ; à la maladie ; au chômage ; à la vieillesse. Le 08 Décembre 1961, l’adoption de la Loi n°61/ 63 attribuant la gestion des accidents de travail et des maladies professionnelles jusque-là gérée directement par les employeurs à la Caisse de Compensation des Prestations Familiales (C.C.P.F). En 1962, la Caisse de Compensation des Prestations Familiales (CCPF), devient la Caisse Gabonaise de Prévoyance Sociale (C.G.P.S).

3 – La période du monopartisme et des ajustements structurels (1965-1990)

     Cette période sera alors marquée par la gratuité de soins, Ainsi, l’organisation du système de santé gabonais va se fonder sur les soins de santé primaires. En 1971, le décret n°00269/PR/SEAS du 3 mai 1971, crée l’aide sociale au Gabon. Le ministère des affaires sociales est créé en 1971.

     Le centre de santé d’Okala construit en 1972, puis fermé pour quelques années à cause de la détérioration des locaux, et réhabilité en 2004.

     La création de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie (CNSS) date de 1975 (loi n°6/75), et son premier hôpital, l’hôpital pédiatrique d’Owendo (HPO), dans le but de dispenser des soins spécialisés en pédiatrie à Libreville a été construit en 1977. Aussi, Les ressources de la Caisse sont constituées par : – Les cotisations des employeurs et des travailleurs destinées au financement des différentes branches du régime de Sécurité Sociale ; – Les majorations encourues pour cause de retard dans le paiement des cotisations ou dans la production des déclarations nominatives des salaires et des intérêts moratoires ; – Le produit des placements de fonds suivant les règles fixées à l’Art .39 de la présente loi ;- Les dons et legs ; – Toutes autres ressources attribuées à la Caisse par un texte législatif ou réglementaire.Les dépenses de la Caisse concernent- Le paiement des prestations prévues pour chaque branche ; – Les frais d’Administration ; – Les dépenses du fonds d’action sanitaire et sociale.Elle gèrele régime de sécurité sociale qui comprend la couverture des accidents du travail et maladies professionnelles, des pensions, des prestations de santé en cas d’évacuation sanitaire à l’étranger ainsi que la délivrance des prestations familiales.

     Ainsi, le décret n° 0013/PR/MSPP du 23 janvier 1978, consacra la création de l’hôpital régional de Melen. EN 1978, adhésion du Gabon à la déclaration d’ALMA ALTA sur la stratégie des soins de Santé primaires (SSP) pour atteindre l’objectif de la santé pour Tous à l’an 2000.

     Les années 1980 vont être marquées par un engouement en faveur des soins de santé primaires avec la mise en place des structures aux différents niveaux, la formation des agents de santé de village, la construction des cases de santé et la mise en œuvre des différentes composantes de soins de santé primaires. En 1983 (loi 10/82) la Caisse Nationale de Garantie Sociale (CNGS) est créée et organisme assure la prise en charge des agents contractuels de l’État, des travailleurs indépendants souhaitant s’y affilier, ainsi que des indigents.

     En 1983, l’hôpital chinois dans le quartier Belle Vue avec la coopération chinoise. L’inauguration de cet hôpital a eu lieu en mars 1984.

     Grâce au boom pétrolier, l’Etat Gabonais a pu assurer la gratuité des soins et des médicaments à sa population pendant une longue période. En 1987, c’est l’adhésion à l’initiative de Bamako visant à relancer les soins de santé primaires.

      À la fin des années 1980 et le début des années 1990, le Gabon, traverse une crise économique et financière sans précédent.

4 – La période de Transition politique (1990-2006)

     Dans les années 1990, La loi 12/95 du 14 janvier 1995 fixe les orientations de la politique de santé en République Gabonaise. Elle fixe trois grandes priorités : la protection de la mère et de l’enfant ; le renforcement du système de prévention, en insistant en particulier sur la médecine préventive, l’hygiène publique et l’assainissement, l’Information l’Education et la Communication en matière de santé ;  la protection des groupes de population vulnérables tels que les malades mentaux, les handicapés et les personnes âgées.

     L’adoption de l’ordonnance 001/1995 portant orientation de la politique sanitaire va mettre fin au principe de gratuité des soins et introduire le principe de l’usager payeur. C’est à partir de cette date que les populations sont appelées à payer pour les frais de santé. L’application de cette nouvelle disposition ne se fait pas sans grandes difficultés pour les pauvres et les groupes vulnérables.

     En 1996, la loi n19/95 relative à la protection des handicapées est adoptée : Conformément au décret n°00269/PR/SEAS du 3 mai 1971 relatif à l’aide sociale au Gabon,

Selon la loi n°19/95 du 13 février 1996 portant organisation de la protection sociale des personnes handicapées au Gabon en son article 2, « est considérée comme personne handicapée toute personne qui, frappée d’une déficience physique, sensorielle ou mentale, congénitale ou accidentelle, éprouve des difficultés à s’acquitter des fonctions normales exercées par toute personne valide ».

     D’après les données des affaires sociales, le Gabon compte, en 2006, 4252 personnes handicapées, 4203 en 2007 et 4398 personnes handicapées en 2008. (Ces données n’intègrent pas les personnes handicapées qui ne se sont pas fait recenser auprès du Ministère des Affaires Sociales). Conformément au décret n°00269/PR/SEAS du 3 mai 1971 relatif à l’aide sociale au Gabon, le Ministère des Affaires Sociales, alloue une aide permanente annuelle aux personnes handicapées. Celle-ci est passée de 50 000 en 2006 à 75.000 francs CFA en 2011. A cela s’ajoutent des dons en matériel orthopédique, renouvelable tous les cinq ans.

     En 1998, le Gabon adopte en 1998, son premier Plan national d’Action Sanitaire (PNAS). LePlan National d’Action Sanitaire (1998-2000) qui a pour objectif : L’amélioration du cadre institutionnel ; l’amélioration de la qualité des soins ;- La rationalisation des ressources humaines et financières. Malgré, la volonté des pouvoirs publics à mettre en place un système de santé performant, le PNAS necomblera pas les attentes des populations en matière de santé publique. Et En 2005, il eut la tenue des états généraux de la santé.

     En 2000, plusieurs mesures relatives à la protection de la mère et de l’enfant sont prises.

5 – La période post Transition politique (2007-2018)

     Au Gabon, une innovation en matière de protection sociale, c’est l’ouverture d’une assurance maladie universelle. En 2007, l’adoption de l’ordonnance numéro 22/PR/du 21 aout 2007 a entrainé la création de la Caisse Nationale d’assurance Maladie et Garantie Sociale (CNAMGS). La CNAMGS est composée de 3 fonds distincts à sa création qui compte en 2021 quatre fonds : Le fond d’assurance maladie des agents publics, Le fond d’assurance maladie du secteur privé, parapublic, des professions artisanales, Le fond de garantie sociale des gabonais économiquement faibles, des étudiants, des élèves et réfugiés; le fond des non gabonais, des artisans, des travailleurs du secteur informel. Elle a pour mission de garantir une couverture maladie universelle et assurer le service de prestations sociales aux Gabonais identifiés comme économiquement faibles. C’est le régime obligatoire d’assurance maladie pour tous, elle s’occupe de la prise en charge des évacuations sanitaires ainsi que le service de prestations familiales aux Gabonais Économiquement Faibles (GEF).

     D’après l’enquête sur l’évaluation de la pauvreté de 2017, ce système de santé offre une couverture limitée à la fois à l’ensemble de la population mais aussi aux pauvres. Seulement la moitié de la population (soit 54 %) est inscrite à la CNAMGS, ce qui signifie que la moitié du pays est exclue du système de santé formel. La CNAMGS est censée assurer une couverture complète des populations pauvres et vulnérables, en se basant sur leur appartenance à la catégorie des GEF. Toutefois, la classification des GEF ne correspond pas  entièrement à la définition des pauvres selon l’approche des besoins essentiels. Les critères de définition du statut de GEF et la liste des bénéficiaires font actuellement l’objet d’une mise à jour qui s’appuie, entre autres, sur l’EGEP de 2017. La structure actuelle de la CNAMGS empêche les travailleurs du secteur informel (hormis les GEF) de bénéficier de la couverture de l’assurance maladie. Par conséquent, environ 18 % de la population et 21 % des pauvres vivant en zones urbaines sont exclus du système de santé (correspondant à la catégorie « En attente d’inscription » dans la figure 4.11-a). Parmi les autres raisons majeures qui restreignent l’adhésion à la CNAMGS figurent l’absence de pièce d’identité officielle qui demeure nécessaire pour pouvoir s’inscrire, ce qui concerne 2 % de la population et 3 % des pauvres, ainsi que la difficulté de comprendre les procédures et les conditions nécessaires pour s’inscrire correctement.

     Il est à rajouter également que si ce système de couverture semble accroitre l’utilisation des services de santé, certains facteurs en limitent l’accès (socio-culturels, économiques, proximité géographique, pénuries en ressources humaines et équipements médicaux). (N’doh Ashken Sango, 2020).

     En 2015, les autorités gouvernementales décident de réduire de manière significative la prolifération anarchique des structures sanitaires privées.

     L’hôpital Jeanne Ebori, consacré à la mère et à l’enfant voit le jour à Libreville en 2017.

     En 2018, le Décret n00011/PR MS du 26 mars 2018 instituant la gratuité des accouchements dans les structures publiques est acté. En mars 2018, les accouchements sont gratuits dans les structures sanitaires publiques. Les prestations gratuites dans les structures sanitaires publiques sont les suivantes : l’accouchement par voie basse et par césarienne, l’hospitalisation, la garde en observation, les soins post-partum de la mère, les soins néonataux, les médicaments et le transport médicalisé

6 – La période Covid 19 (2019-2021)

     La pandémie du Covid a montré les limites des structures hospitalières du Gabon. En effet le constat accablant avait déjà été fait dans le rapport sanitaire de 2017 : Au Gabon ; selon le rapport sanitaire de 2017, les équipements d’aide au diagnostic ne sont toujours présents, dans toutes les structures sanitaires. Si dans les grands hôpitaux publics on en trouve, il n’en est pas de même pour les centres de santé. Les équipements d’imagerie minimum requis pour un CHR sont une radiologie conventionnelle et un échographe. Sur 9 CHR, un seul n’avait pas de radiologie conventionnelle fonctionnelle (CHR Benjamin NGOUBOU de Tchibanga) et 2 ne disposaient pas d’échographe en 2017 (CHR de Melen dans la Région Sanitaire Ouest et celui de Port-Gentil, Région Sanitaire Maritime. Sur les 38 Centres Médicaux sociaux, 2 avaient une radiologie et 6 un échographe fonctionnel en 2017.

     Pour face à la pandémie, le gouvernement a mis en place un comité de pilotage du plan de veille et de riposte contre l’épidémie du coronavirus (COPIL).Création d’un fond de solidarité, mise en place d’un numéro vert : 1410, dépistage de masse du COVID-19, Prise en charge gratuite des soins de santé des malades de la COVID-19 ; Gratuité du test de dépistage dans des formations médicales agréées, port obligatoire du masque dans les lieux publics pendant la période d’urgence liée au COVID-19, Mise en place des points d’eau et de gels hydro alcoolique dans les grands carrefours, exonération temporaire du paiement du ticket modérateur, en raison de la pandémie du COVID-19, au profit des assurés Gabonais économiquement faibles (GEF), assurés à la Caisse Nationale d’Assurance Maladie et Garantie Sociale.